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 CINEMA :Les blessures narcissiques d'une vie par procuration
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CINEMA :Les blessures narcissiques d'une vie par procuration

VIP-Blog de tellurikwaves
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  • Créé le : 10/09/2011 19:04
    Modifié : 09/08/2023 17:55

    Garçon (73 ans)
    Origine : 75 Paris
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    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964) p6

    29/12/2012 05:13

    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964)  p6


    *

    Une rupture avec la représentation traditionnelle de la temporalité au cinéma
    Le brouillage des frontières temporelles
    Le cinéma d’intrigue ou d’action se fonde sur l’enchaînement logique et sur le crescendo des émotions et des faits, donc sur une progression dramatique. Ce cinéma est lié à une temporalité caractérisée par la linéarité et par le mouvement. Cette temporalité ne convient pas aux voyages intérieurs que propose Antonioni.

    C’est pourquoi il ne construit pas le récit du Désert rouge de manière traditionnelle. Pour qualifier la temporalité très particulière du cinéma d’Antonioni, Alberto Boatto parle d’une "temporalité dilatée, sans impulsion artificielle et sans progression linéaire". En effet, il n’y a ni flash-back ni anticipation, même lorsque le récit aurait pu le justifier.

    Par exemple, il aurait pu y avoir un flash-back dans le récit pour figurer la tentative de suicide que Giuliana a fait passer pour un accident, mais à la place de cet effet de style, c’est un évènement similaire qu’Antonioni fait intervenir dans le récit. Giuliana paraît rejouer son faux accident en fonçant en voiture jusque devant la mer.

    La tentative de suicide de Giuliana appartient ainsi au présent, non au passé. Le temps du film – qui, selon une formule d’Aldo Tassone, est « une sorte d’éternel présent, dilaté, suspendu, non progressif » – est celui d’une durée subjective.

    Antonioni cherche à nous donner l’impression de vivre avec les personnages leur propre perception du temps, en acte, plutôt que de nous proposer une œuvre structurée en fonction d’une temporalité redécoupée a posteriori par le montage.






    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964) p7

    29/12/2012 05:28

    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964)  p7


     

    L’importance des temps morts dans le récit

    Laurence Schifano explique qu’Antonioni recompose une durée réelle par la présence de"temps morts"et par l’irruption arbitraire d’éléments bruts, documentaires, chaotiques.Il explore le personnage extérieurement, en le suivant dans les longues séquences qui mettent l’accent sur les temps morts.

    Aldo Tassone relève :"Antonioni continue à filer ses interprètes jusque dans les moments où, une fois la scène bouclée, tout semble avoir été dit du point de vue de l’action.Dans ces "temps morts", la caméra tente d’aller recueillir, à l’intérieur même des personnages, les répercussions des événements. "Il est donc erroné de les nommer"temps morts" puisqu’ils ont une fonction précise", observait avec ironie le cinéaste."

    Antonioni dit lui-même de ces temps morts que « sans ces moments de transition, qui sont les plus vrais pour moi, une histoire n’a plus d’intérêt ». La volonté des personnages est en effet plus remarquable que l’accomplissement de leurs désirs et les scènes s’enchaînent par des appels de tension plus que par des nécessités de logique narrative.

    Rien ne se passe dans ces temps morts, mais la durée se dilate dans l’attente d’un événement capital qui ne se produit pas car la solitude de l’homme est inhérente à sa nature. Fabio Carpi qualifie le regard d’Antonioni de "regard laïc qui, à l’intérieur du plan-séquence, récupère les battements du cœur dans les temps morts". Il ajoute : "C’est un narrateur pervers qui détruit les histoires, auxquelles il ne croit pas, pour nous donner les cordonnées de la vie perçue comme une énigme existentielle."

    On parle de modernité pour définir le cinéma d’Antonioni en raison de son choix de ne pas recourir aux structures traditionnelles de la narration. Ainsi, il ne s’agit pas tant de raconter une histoire que de suivre les personnages auxquels il s’attache. C’est pourquoi il conserve les "temps morts".

    Dans la vie, ceux-ci ont en effet autant d’importance que les temps forts. C’est une autre forme de réalisme que celle que le cinéma a l’habitude de représenter, un réalisme que la critique française a qualifié de"réalisme intérieur".






    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964) p8

    29/12/2012 05:39

    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964)  p8


     

    Les personnages

    Entre son mari, son amant et son fils, Giuliana est malgré tout névrosée et suicidaire : dans le brouillard, au port, elle fonce en voiture et ne s’arrête qu’à quelques centimètres de l’eau. Auparavant, elle avait déjà attenté à ses jours à la clinique, après son accident d’automobile à l’occasion duquel son mari n’était même pas revenu de Londres pour la voir.

    De plus, Giuliana a toujours froid, frissonnant dans cet hiver perpétuel sans rêve ni soleil mais avec du brouillard, du gris et la maladie qui rôde. Cachée (dans le bateau), simulée (par le fils singeant la polyo), cancer de l’âme (la névrose) favorisé par le silence de la parole humaine.

    Contrairement à Giuliana,Ugo est un homme tranquille et leur jeune fils Valerio est passionné de jouets mécaniques tels que robots, gyroscopes et est ouvert à toutes les nouveautés qui l’entourent. C’est tout le portrait de son père : ils sont tous deux adaptés à ce monde des machines et des usines.

    À ce sujet, le gyroscope est un symbole parlant, car au-delà de son intérêt scientifique, il illustre la stabilité dont jouissent Ugo et son fils et qui fait si désespérément défaut à Giuliana. Elle se remarque alors par son inadaptabilité au monde : elle est en total décalage avec les autres personnages comme elle est décalée face à l’univers métallique des usines.

    Elle est incapable de créer un lien avec son entourage. D’autre part, c’est à travers les yeux de Giuliana que nous voyons le monde, puisque Antonioni est intéressé par :"les faits et les sentiments humains passés au filtre de la psychologie féminine ". C’est pour ça qu’on perçoit une certaine inquiétude : Giuliana est sans cesse angoissée, elle a peur de tout : du bruit assourdissant des machines de l’usine, de la maladie de son fils et plus tard, du départ de Corrado.

    L’arrivée de ce nouveau collègue d’Ugo justement, arrivé afin d’embaucher des ouvriers pour l’étranger, va changer le regard qu’elle pose sur elle-même et elle va moins se sentir hors du monde. Cet homme, au départ inquiet par l’attitude de Giuliana, finira par être attendri et il se rapprochera d’elle, car finalement tous les deux se ressemblent : Corrado est  "un autre inadapté ", fragile, aussi mal dans sa peau.

    Ils vont se rencontrer pour la première fois dans un magasin que tente d’aménager Giuliana, censé lui donner une occupation stabilisante. Mais, située dans une rue solitaire et incurvée, la boutique est de toute manière impropre au commerce. 






    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964) p9

    29/12/2012 05:56

    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964)  p9


                                                    Photo du haut: Richard Harris

     

     

    Quand Corrado rend visite à Giuliana dans cette boutique, elle se montre particulièrement désorientée : elle est incapable de dire ce qu’elle a l’intention de vendre ni de quelle couleur décorer les murs. Ils se rencontreront ensuite plusieurs fois, en présence d’Ugo ou lors d’une réunion d’amis dans une cabane. Leur dernière rencontre se passe dans la chambre d’hôtel de Corrado, où Giuliana est venue se  réfugier après avoir découvert le simulacre de son fils.

    Le désir sexuel semble être la seule solution pour Giuliana de compenser sa solitude (puisque son mari la délaisse). Il  n’existe pas de rencontre entre hommes et femmes qui ne soient pas d’essence sexuelle, la dimension érotique étant inhérente aux rapports humains pour Antonioni : citons en exemple la scène dans la cabane où l’érotisme très présent (œufs de caille aphrodisiaques, personnages se caressant). 

    Mais cette liaison passagère avec Corrado ne procure pourtant pas à Giuliana la stabilité recherchée et son attitude rappelle plutôt sa crispation physique au début du film. De plus, dans la dernière scène du film, elle continue à errer  dans le paysage industriel : l’image de la fin du film est la même qu’au début : Giuliana marchant avec son fils dans les alentours des usines : elle ne semble pas plus tranquille, pas  plus équilibrée, et le son électronique du début reprend, comme pour nous montrer que le changement total n’existe pas.

    Sa relation avec Corrado a été vaine. Il n’a pas été  capable d’assumer ses sentiments, car il est déconcerté par l’attitude des femmes en général. Une fois Corrado parti, elle tentera même une conversation avec un marin qui ne  parle pas italien. Tous deux illustrent le personnage antonionien, qui attend beaucoup de la vie, sa déception étant à la mesure de ces espérances. 

    De plus il maîtrise  généralement peu ses sentiments. Ils les ressentent, en souffrent, mais en dissertent mal puisque leurs raisonnements ne les sortent pas des impasses dans lesquelles ils se fourvoient. Ils ne peuvent qu’accepter leur situation. Il n’y a donc pas de héros positif.Antonioni exprime ainsi l’incommunicabilité, la difficulté d’avoir des rapports humains satisfaisants.

    Pour le réalisateur, les états d’âme de ses personnages s’expriment  essentiellement par le regard. C’est la seule preuve que les êtres puissent avoir pour savoir s’ils se comprennent ou pas. Voir c’est aussi regarder, et donc, de ce fait, savoir quoi  regarder. C’est bien là le problème de Giuliana, qui ne sait « pas quoi voir », et ne trouve donc pas de raison de vivre. Mais voir c’est aussi imaginer et fantasmer : cela reflète une  autre facette de la personnalité de Giuliana. 






    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964) p10

    29/12/2012 06:06

    © DR - LE DESERT ROUGE de Michelangelo Antonioni (1964)  p10


     

    C’est aussi une femme calme et douce, notamment avec son fils. Cela se produit lors d’un épisode étonnant au bord de l’eau. Partant de la chambre du fils, où Giuliana raconte une histoire, Antonioni nous plonge dans un univers totalement différent du reste du film. Il n’y a aucun bruit assourdissant, seul la voix de  Giuliana.

    L’onirisme de cette séquence semble représenter le seul refuge de Giuliana : l’imaginaire. Et, lorsque la jeune fille de l’histoire nage, elle entend une voix de femme  comme venue de la mer (qu’on a aussi entendue au début parmi les bruits industriels sans comprendre ce qu’elle signifie).

    Ce serait l’expression du désir de fuite en elle-même de  Giuliana face à la stabilité évidente de Valerio et d’Ugo. En cela elle rejoint Corrado, qui lui aussi cherche à fuir par ses rêves de voyage en Patagonie. Cependant personne  n’arrivera à sortir Giuliana de son état de dépression. Elle a perdu le contact avec la vie et toute confiance en elle- même ; elle s’isole, même de ceux qui lui sont proches.

    Ajoutons qu’Antonioni utilise des techniques particulières pour transmettre les ressentis de Giuliana. Citons l’exemple du flou : il signifie qu’elle ne sait plus accommoder sur le réel. De plus, le réalisateur parle d’un "rendu en couleurs des émotions, une mise en couleurs qui d’une façon dynamique ou inconsciente veut illustrer et suggérer l’état émotionnel". Il s’agit de la visualisation plastique des angoisses de la jeune femme. Le monde dont Giuliana a peur, Antonioni l’exprime ainsi de manière formelle.

     





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