DVD Classik (suite)
Ce cauchemar filmé par Molinaro, c'est évidemment celui d'Ancelin. A aucun moment, tout au long du film, il ne lui arrive quelque chose de bon. Dès l'ouverture, il perd sa femme dont il avait déjà perdu l'amour, puis perd sa dignité en se transformant en assassin avant d'errer vers une mort certaine. On peut d'ailleurs considérer qu'Un témoin dans la ville est essentiellement l'illustration de l'autodestruction d'Ancelin. Dès qu'il assassine Verdier, il ne cherche plus rien d'autre que la mort. En sortant de la demeure de l'amant de sa femme, il voit le taxi de Lambert et comprend que son meurtre n'est pas parfait. Il se met alors à le suivre. On pourrait penser qu'il s'agit de s'assurer de son silence.
Mais alors qu'il à l'occasion de le pousser sous le métro, il ne le fait pas, prouvant ainsi qu'il n'est pas au fond de lui un véritable assassin, et qu'il n'est pas prêt à tout pour se sauver. Son acte de vengeance, il ne pouvait s'empêcher de le commettre mais il est incapable de l'accepter. Reste alors pour lui à errer, dans le sillage du témoin,pour qu'il le mène à sa mort. Cette errance tragique est profondément émouvante, alors que le film nous donne finalement peu d'éléments quant au personnages d'Ancelin. On sait sa tragédie de cœur, mais la première chose que l'on voit de lui, c'est le meurtrier. Pourtant, l'empathie est immédiate envers le personnage, tant sa tristesse et sa solitude transparaissent.
Un très beau personnage, formidablement incarné et à qui le spectateur conservera son attachement, malgré les circonstances terribles de sa fin. En fin de compte, dans un contexte policier, Molinaro a su extraire son film des mécaniques habituelles du genre. Il n'est pas vraiment question de suspense dans Un témoin dans la ville, à vrai dire il n'y en a aucun. C'est une tragédie à laquelle nous assistons, à la trajectoire inéluctable d'un homme frappé par le destin, et contre lequel il n'a plus la force de lutter.