Surveen Chawla : Bijli, la danseuse prostituée
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Il en est ainsi de Rani, veuve à quinze ans après un mariage forcé, condamnée à ne s’habiller que de noir et à élever seule ses enfants. Comment ne pas être révoltée en découvrant Lajjo, les bras et le visage couverts de bleus ? Habilement, l’histoire nous décrit une personne douce et résignée qui parvient même à justifier l’attitude de son mari "Il travaille beaucoup. Sur qui d’autre que moi, pourrait-il se défouler ?" Ce qui ne l’empêche pas de rire et de plaisanter.
De quoi renforcer la compassion qui nous lie à elle, sans jamais tomber dans le misérabilisme. Car, malgré les situations dramatiques qu’elle nous livre, la réalisatrice choisit la voie de l’optimisme et d’une gaieté à toute épreuve, créant une empathie immédiate avec ces malheureuses oppressées. Les saris aux couleurs chatoyantes virevoltent au gré des nombreuses activités des femmes et éclairent ce décor au ton de sable. Et puis, en Inde, quoiqu’il arrive, on n’oublie jamais la musique et la danse.
C’est d’ailleurs par ce biais que naît l’espoir d’émancipation, à travers le personnage de Bijili. Devenue danseuse itinérante, considérée comme une prostituée, elle est la seule à avoir osé quitter le village. Elle tente, non sans mal, d’imposer sa liberté. Les autres femmes, partagées entre crainte et admiration, rêvent de lui ressembler, sans vraiment oser y croire. C’est pourtant elle qui, dans un immense élan de solidarité et d’amitié, leur donnera la force de prendre leur destin en main en leur permettant de croire qu’elles ne valent pas moins que les hommes.
La musique magnifiée par la voix brute de Gaazi Khan achève de bouleverser les spectateurs que nous sommes face à tant de détermination joyeuse. Une ode magnifique et nécessaire à celles qui, tous les jours par leur optimisme et leur courage font reculer les formes d’oppression dont sont encore trop souvent victimes les femmes.