Simone Renant
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Analyse et critique DVD Classik(suite)
Clouzot, à peine sorti d'une période d'interdiction de filmer par le Comité de Moralisation du Cinéma français (il a été soutenu par Camus et Sartre alors qu'il demande en 1946 la révision de son procès), semble revenir à son rôle de « maître du policier » mais livre sous le manteau une œuvre complexe, brisant même à l'occasion le tabou de l'homosexualité féminine (l'inspecteur Antoine dit à Dora : « Vous êtes un type dans mon genre, avec les femmes vous n'aurez jamais de chance »).
A la vision de Quai des Orfèvres, il est évident que Clouzot ne peut être limité au seul cinéaste nihiliste que l'on a dépeint avec force caricature. Si sa vision de l'humanité est souvent dure et sans appel (L'Assassin habite au 21, Le Corbeau, Les Diaboliques), son cinéma est aussi emprunt d'humanisme. Refusant les frontières toutes tracées entre le bien et le mal (volonté très clairement explicitée dans une fameuse scène du Corbeau), il filme juste ses contemporains avec une lucidité qui est souvent passée pour un pessimisme forcené.