DVD Classik (suite)
Adaptation d'un roman de Boileau et Narcejac, duo qui était déjà une source d'inspiration pour les Diaboliques de Clouzot ou Sueurs froides de Hitchcock - de sacrées références -, Un témoin dans la ville se caractérise d'abord par le faible volume de ses dialogues, élément traditionnellement majeur dans le cinéma policier. Ici, le silence se fait souvent dominant, notamment lorsque le personnage d'Ancelin est à l'écran. Dès son apparition, alors qu'il s'infiltre dans la demeure de l'assassin de sa femme, Molinaro filme une longue séquence sans le moindre mot, ce qui deviendra l'une des caractéristique du personnage d'Ancelin, quasi muet.
Un élément qui plait d'ailleurs beaucoup à Lino Ventura, qui dans la suite de sa carrière interprétera de nombreux personnages peu diserts. Ancelin, qui a tout perdu dès l'ouverture du film et le meurtre de sa femme qui ne l'aimait déjà plus, n'a presque plus aucun contact avec l'humanité, comme s'il était un fantôme. A cette atmosphère silencieuse s'ajoute le poids de l'obscurité. La quasi- totalité du film se déroule dans la nuit, à quelques rares exceptions. Et encore, lorsqu'il fait jour, les personnages dorment après une nuit de travail, ou comme Ancelin, attendent. Le jour et la lumière ne sont pas l'univers des protagonistes.
Pour preuve, lorsque Ancelin suit Lambert à la sortie de son travail, ils remontent à contre-courant la foule sortant de la bouche du métro, illustration par l'image qu'ils n'appartiennent pas au monde de ceux qui vivent à la lumière du soleil. Ces éléments installent une atmosphère particulière, quasi surréaliste, qui donne au spectateur l'impression de voir se dérouler un rêve, ou plutôt un cauchemar, sous ses yeux. Il faut, à ce titre, souligner le formidable travail du chef opérateur Henri Decaë, un des plus grands représentant de sa profession qui au même moment travaille avec Chabrol, Truffaut, et accompagnera Melville tout au long de sa carrière photographiant quelques uns des ses films noirs principaux, notamment Le Samouraï et Le Cercle rouge.