Plus intéressant est le deuxième couple, formé par Rita et George Phipps. Rita est une travailleuse acharnée, dévouée à son travail et déterminée à grimper les échelons sociaux. Son mari, le très intelligent et adorable George, est un professeur de Lettres. Instruit et d'attitude simple, George est heureux en couple et se bat contre la domination écrasante de traditions sociales et sociétales qui vont selon lui à l'encontre de la possibilité du bonheur. Sa femme gagne bien mieux sa vie que lui, ce qui ne le dérange en aucune façon mais qui, à l'époque, constitue un sacré pari de la part du film.
Rappelons que l'idée selon laquelle la femme peut gagner davantage d'argent que son mari demeure en définitive récente, et pose encore aujourd'hui bien des problèmes à nos sociétés modernes encore excessivement phallocrates. Si cela reste aujourd'hui régulièrement discuté, pour ne pas dire mal vu, imaginons un instant ce que cela pouvait donner dans un pays célébrant dans les années 1950 le triomphe du self made man. Les USA apparaissaient plus conformistes que jamais, faisant du personnage de George une sorte de paria. Un homme « entretenu » selon les mauvaises langues, doublé d'un intellectuel refusant l'abrutissement des masses.
Un être humain qui ne pense pas comme les autres, apprécié de ses amis qui n'en comprennent pas nécessairement l'attitude, et dédaigné par une haute société qui voit en lui un homme de peu de valeur. Il faut entendre son discours sur la publicité pour convenir du fait que rien n'a changé depuis. C'est même devenu bien pire. Perspicace, il cible bien ses répliques et traduit l'idée d'un monde qui va vers l'uniformisation de la pensée. A ses côtés, Rita ne voit que sa carrière.