Critique publiée par Roland Comte le 1 janvier 2015
Persépolis est un film extraordinaire à tout point de vue, par sa technique, d'abord, qui utilise le dessin animé presque exclusivement en noir et blanc (à part quelques scènes colorées ou colorisées), la concision de ses dialogues, son humour décapant (en particulier celui de la grand-mère qui s'exprime dans un langage particulièrement cru, magnifiquement servi par la voix à la fois élégante et malicieuse de notre adorable Danielle Darrieux dont on imagine le plaisir qu'elle a dû prendre à dire ces répliques.
Bien que sorti en 2007, ce film est, hélas, toujours d'actualité et il a quelque chose de visionnaire dans sa description du processus du passage d'une dictature occidentalisée à un autre type de dictature, encore plus rétrograde et réactionnaire, processus qui est en train de se dérouler sous nos yeux dans la plupart des pays ayant connu le "printemps arabe", que ce soit l'Egypte, la Tunisie et peut-être demain la Syrie*, le Yémen et pourquoi pas le Maroc et l'Algérie...
* Pour la Syrie, à l’heure où je reprends ce billet, le pays, toujours dirigé par le dictateur Bachar El-Hassad, est en pleine guerre civile depuis 2011. Celle-ci a fait entre 100 000 et 150 000 morts et l’avancée des djihadistes qui se sont emparés d’une partie du pays, a poussé plusieurs millions de syriens hors du pays. On sait peu de choses sur ce qui se passe au Yémen mais les tensions y sont vives, de même qu’en Libye, depuis le renversement de Kadhafi où en Egypte où l’instabilité est quotidienne. Après une guerre civile, entre 1991 et 2002, presqu’aussi meurtrière que celle que l’on voit se dérouler actuellement en Syrie, la situation en Algérie est stabilisée mais la paix y est fragile et en grande partie artificiellement maintenue par un régime semi-totalitaire.