(Même film ?...sous réserve)
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Antonioni, cinéaste sans frontières
par François Legay 19 Avril 2015, 10:27 Ciné Expos
Ferrare 2012. Bruxelles 2013. Paris 2015. Amsterdam 2016 ?
Comme celui à qui elle rend hommage, l’exposition Michelangelo Antonioni aime à changer d’espace, de couleur, de pays.Avec à chaque fois des thématiques différentes (« L’homme de la Renaissance », « L’homme d’architecture », « L’homme contemporain »…) mais qui ne sont finalement que des propositions d’itinéraires pour une seule et même destination : l’œuvre d’un maître, ou plutôt, puisqu’il était italien, d’un maestro.
Insaisissable, Michelangelo Antonioni le fut toute sa vie. Refusant l’académisme et une carrière nationale, il s’exporta au grès des courants et des modes de son temps. Non pas parce qu’il était futile, mais parce qu’il avait compris que le monde était en constante évolution et que son rôle à lui, en tant que réalisateur, était d’être le témoin de cette évolution.
Évolution d’un monde qui faisait écho à des thématiques qui lui étaient propres : la recherche de l’identité, la solitude au milieu d’une société qui remue, qui bouge perpétuellement pour se prouver qu’elle est vivante, la fuite de l’ennui, de l’enfermement, de la certitude, du passé.Curieux, multiple, voyageur, aventurier, observateur, cinéaste et peintre, il était un homme du présent.
Antonioni a été là où se passait son époque. Et comme l’époque fut très variée, son œuvre fut très variée.En ce sens l’exposition (dont le commissaire n’est autre que Dominique Païni, ce qui est un gage de qualité) lui ressemble et la scénographie est plutôt originale : une grande pièce principale traversée sur toute la longueur par une continuité de vitrines dans lesquelles on peut admirer moult (le mot est faible) documents (lettres, photos, magasines de cinéma, articles, critiques, scénarios, photos, vidéos de collaborateurs évoquant le réalisateur…). Sur les côtés, des panneaux éclairent les différentes parties de sa carrière (et donc de sa vie), et enfin le mur du fond est consacré à son activité de peintre.
On navigue entre sa jeunesse à Ferrare, son arrivée à Rome, sa fascination pour l’actrice Lucia Bosè (avec il tournera ses deux premiers films : Chronique d’un amour et La dame sans camélia), son admiration pour Visconti (pourtant homme du temps jadis), Monica Vitti et les 4 films qu’il fit avec elle (la trilogie : L’Avventura, La notte, L’éclipse puis Le désert rouge), Blow-up, Zabriskie point, Chung Kuo, la Chine (le documentaire que le régime communiste Chinois lui commanda pour finalement l’interdire), Profession : reporter, identification d’une femme, par-delà les nuages (coréalisé avec Wim Wenders)....le maestro construisit son œuvre au rythme d’un monde qui se perdit à trop se chercher une identité ou une raison d’être.
Face au trop beau, trop fort, trop vite, trop grand qui marqua la seconde moitié du 20ème siècle, Michelangelo Antonioni est peut être le seul réalisateur à avoir compris que tout est mêlé (existence et création, Arts et politique) sous la forme d’une empreinte, détail dérisoire au milieu de l’immensité mais qui prend soudainement toute la place si on ne regarde qu’elle…