Critique publiée par Vino le 2 mai 2014
Avec Welcome, Philippe Lioret a le mérite de nous faire une esquisse réussie d’un problème d’une actualité brûlante en France, à savoir la place des immigrés dans notre société en nous proposant un scénario autour d’évènements que l’on ne connaît finalement que trop mal. Dans le meilleur des cas, on se les imaginait.
Le film de Lioret marque alors la rencontre entre deux individus qui se sont un peu égarés dans leurs vies respectives mais que tout oppose. Le premier, perdu dans un pays qu’il ne connaît pas et le second, errant dans une ville qu’il connaît trop bien. Accueilli d’un œil mauvais par les autorités françaises, le jeune Bilal ne désire qu’une chose, apprendre à nager et rallier les côtes britanniques par ses propres moyens.
Pari impossible et Simon le sait bien mais n’ayant personne à qui se rattacher après sa séparation d’avec sa femme, il va finalement trouver chez ce réfugié ces choses qu’il a perdu et qu’il voudrait avoir encore. Etre capable de traverser la rue pour la retenir. Interprété par un Vincent Lindon plus qu’impeccable, le film se veut ainsi être une fiction teintée de réalisme sur un fond politique amer qui fait grincer les dents. Bilal n’est pas ignoré comme il pourrait l’être, il est pourchassé, interdit de fréquentation.
C’est ce qui rend d’ailleurs la relation entre les deux personnages principaux si intense et si difficile aussi. Deux mondes s’opposent, deux idéaux : celui qui a des rêves et qui ne veut pas cesser d’y croire et celui qui a suffisamment bourlingué pour se rendre compte que le jeu n’en vaut pas la chandelle. L’espoir et la désillusion. Trop porté par ces espérances, Bilal ne la connaîtra finalement jamais la désillusion. Il n’en aura pas le temps.
Constat dur et bouleversant qui échappe toutefois au misérabilisme pur, Welcome est un film touchant et qui marque tout en conservant un degré de sobriété et de pudisme. Belle et froide comme les plages du Nord, cette œuvre, qui nous est offerte par un cinéaste engagé, fait briller le reflet des situations éphémères de ces immigrés qui marchent vers un demain meilleur.