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Eric Besson demande au cinéaste de "retirer ses propos" faisant un parallèle sur la situation des migrants à Calais et celle des Juifs en 1943. Philippe Lioret répond que "Welcome" dénonce des "mécanismes répressifs".En pleine journée de sortie du film, la torchon brûle entre les deux hommes. Samedi, Eric Besson accusait le cinéaste auteur de "Welcome", Philippe Lioret d'avoir "plus que franchi la ligne jaune lorsque, dans une interview à La Voix du Nord, il dit ‘les clandestins de Calais sont l'équivalent des juifs en 43' : cette petite musique-là est absolument insupportable". Philippe Lioret contre-attaquait dans une lettre ouverte au ministre de l'Immigration publiée par Le Monde (daté de mercredi). Le cinéaste y assurait avoir voulu, avec ce film, non pas mettre en parallèle la situation des migrants à Calais et celle des juifs sous l'occupation, mais dénoncer des "mécanismes répressifs" qui se "ressemblent étrangement".
"Sachez qu'en l'occurrence, je ne mets pas en parallèle la traque des juifs et la Shoah, avec les persécutions dont sont victimes les migrants du Calaisis et les bénévoles qui tentent de leur venir en aide, mais les mécanismes répressifs qui y ressemblent étrangement ainsi que les comportements d'hommes et de femmes face à cette répression", écrivait le réalisateur. "Il y a quelques jours encore, près de Béthune, une femme a été mise en garde à vue pour avoir simplement rechargé des téléphones portables de migrants. ‘Welcome' ne fait qu'illustrer ce genre de fait divers", ajoutait Lioret, affirmant "la réalité, dit-on, dépasse souvent la fiction". Un propos illustré par Jean-Claude Lenoir, président de l'association Salam, qui vient en aide aux migrants à Calais accuse le ministre de l'Immigration de "polémiquer" pour "salir" le film de Philippe Lioret. Selon lui, "Welcome" est un "très bon film, très bien documenté (...) même si le quotidien est souvent bien pire. Il ne se passe pas une seule journée sans que des gens soient matraqués ou gazés".
"Tout le monde a le droit de déraper, mais..."
Réponse ce mercredi de Besson à la réponse de Lioret. Si le ministre estime que le film est un "très bon film", il demande au réalisateur de "retirer ses propos". "Le film lui même est émouvant, Vincent Lindon joue bien et c'est un très bon film, ce que je regrette, c'est l'avant-vente ou l'après-vente du film, il y a eu un dérapage qui est lourd, grave et inacceptable de Philippe Lioret qui tente maintenant de l'atténuer", a-t-il déclaré sur Canal+. "Tout le monde a le droit de déraper, mais dans ce cas, il faut le dire clairement : je retire mes propos... Le vocabulaire qui est issu de la deuxième guerre mondiale, traque, rafle, assimilation aux Juifs en 43, est un vocabulaire grave inacceptable et que, selon moi, on ne devrait jamais utiliser dans le débat politique", a ajouté Eric Besson.
"La situation de Calais est difficile parce que ces personnes ne veulent pas rester en France qu'il s'agisse des Afghans, des Somaliens, des Erythréens... coûte que coûte, ils veulent aller en Angleterre, il ne veulent pas demander l'asile à la France, ils pourraient le faire, nous les aidons et mon ministère met à leur disposition des places d'hébergement qu'ils ne veulent pas utiliser", a poursuivi le ministre. "Donc, je n'accepte pas qu'on dise que ces personnes sont maltraitées alors qu'elles veulent passer clandestinement en Angleterre, ce que l'Etat français ne peut pas faciliter, ce sont les passeurs que nous essayons de traquer et je ne vois pas quel républicain, quel humaniste pourrait avoir le moindre état d'âme à ce que la police traque les filières d'immigration clandestine", a t-il dit.Et la polémique gagne les partis politiques. Le Parti communiste français (PCF) a apporté mercredi "tout son soutien" à Philippe Lioret, estimant que le ministre de l'Immigration "dépass(ait) les bornes".