AVOIR à LIRE
Sur ce thème délicat qui pouvait donner lieu à des effusions sentimentales sirupeuses ou encore à des élans mélodramatiques, le cinéaste a eu le bon goût de choisir la voie de la tendresse et de la douceur, sans jamais forcer le destin de ses personnages. L’air de rien, il dénonce avec force ces filières d’immigration contrôlées par la mafia chinoise, ainsi que cette nouvelle forme d’esclavage qui touche une grande partie de la population immigrée.
Contraints de rembourser les passeurs, ces hommes et ces femmes deviennent une main d’œuvre taillable et corvéable à merci. Simples pions dans un système d’exploitation scandaleux, ces êtres rejetés de tous sont abandonnés à eux-mêmes dans un pays dont ils ne maîtrisent aucun des codes. C’est cet aspect documentaire qui fait indéniablement le sel de ce premier film délicat, mais qui n’échappe pas toujours aux poncifs.
Effectivement, si Andrea Segre évite le piège du mélo, il n’arrive malheureusement pas à contourner les stéréotypes. Ainsi, les portraits des autres piliers de bar ressortent davantage de la grosse caricature -on pense notamment au gros mafieux inculte-(photo) que de la fine observation sociologique. Les personnages chinois ne sont pas non plus suffisamment développés pour échapper aux clichés qui leur sont attachés en Europe.
Enfin, on peut regretter un certain manque de tension dramatique aux trois quarts du film, ce qui se ressent dans le rythme un peu languissant qui s’installe progressivement jusqu’à une fin trop téléphonée pour pleinement satisfaire. Ces scories n’empêchent évidemment pas le charme d’agir, mais elles font de La petite Venise un premier film pas totalement maîtrisé et en demi-teinte.(eh...t'as vu le nombre de prix et récompenses ?)