Edmonde Franchi : la tante de Lila
aux moeurs ...euh...inhabituels (pour une tantine)
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Entretien avec Ziad Doueiri
Q-LILA DIT CA est un roman qui est entré dans les annales de la littérature érotique. Comment avez-vous abordé l’histoire ?
R-Pour moi, LILA DIT CA est avant tout une histoire d’amour entre une personne – Lila – qui débarque dans la vie d’une autre – Chimo – et lui raconte des histoires tellement crûes et osées, qu’il ne peut s’empêcher d’entrer dans cet univers. Chimo s’embarque dans un voyage dont il ne connaît pas le cheminement. Et sans le savoir, Lila provoque un changement. Elle amène Chimo à changer sa vie. . C’est une histoire d’amour passionnelle mais sans déclaration d’amour au sens classique.
Quels étaient les problèmes d’adaptation ?
D’abord, il y avait un récit sans structure conventionnelle. Le livre est écrit à la première personne : c’est Chimo qui raconte son histoire. Le problème de la voix off, c’est que la narration devient vite monotone. Il fallait trouver le bon dosage. L’autre problème concernait le personnage même de Chimo, qui est très passif dans le livre. Il fallait construire un personnage accomplissant un parcours en arc plus cinématographique. C’était d’autant plus difficile que le livre est très bien écrit. Chimo est très touchant. Mais il est lent, parle peu et  tout se passe dans sa tête. Autre problème :il n’y avait plus d’antagonistes, c’est à dire qu’en dehors de Lila et Chimo, les personnages secondaires existaient très peu. Il fallait définir plus clairement quels seraient les obstacles à cette relation.(ouais ? ben moi je m'en serai volontiers passé de ses pourritures de copains)
Pourquoi avez-vous décidé de transposer l’histoire de la banlieue parisienne à Marseille ?
Quand le livre est sorti en 1996, c’était un sujet assez novateur. On commençait tout juste de parler de banlieue au cinéma. J’ai vite réalisé que les banlieues parisiennes, avec leur code et leur psychologie m’étaient totalement étrangères. Et j’ai préféré aller tourner dans une région méditerranéenne, pus proche de mes racines. Je suis parti pour Marseille, en quête de ruelles étroites, avec des maisons les unes sur les autres et le linge qui pend. C’était un choix esthétique.
Le langage de Lila est parfois à la limite du pornographique.
On est sur une ligne très mince. Lila parle d’amour d’une façon décalée, romantique et érotique, mais jamais vulgaire. Une autre actrice que Vahina Gociante aurait pu dire les mêmes phrases et tomber dans le ridicule, le kitsch, l’ordinaire.
Le film évoque aussi les conflits communautaires et religieux…
C’est un thème qui m’est très familier, puisque j’ai grandi au Liban où cohabitent 17 communautés religieuses. Le film prend en considération les événements du 11 septembre pour évoquer la peur de la différence, le racisme et l’intégrisme. Mais les mots sont maniés par des jeunes, avec une spontanéité qui est de leur âge. Mouloud, le chef de la bande des copains de Chimo, est à la fois fier d’être arabe et « mal à l’aise » hors de son ghetto. Il fait partie de ceux qui se replient sur eux-mêmes. Alors que Chimo va s’ouvrir et gagner sa liberté.
Pourquoi avoir changé la fin du livre ?
C’était une fin trop dramatique. Je voulais la rendre plus douce amère et rester sur une note d’espoir.