A 24 ans, Louis Malle a donc en poche une Palme d’or - mais aussi, dans le milieu du cinéma, une réputation grandissante d’arriviste ou de dandy, réputation due à la fois à son tempérament charmeur autant qu’à ses origines sociales (il est l’héritier des industries Béghin) : son insolente réussite agace, et le cinéaste sait qu’il a encore beaucoup à prouver. Dans l’attente du sujet idéal, qui lui permettrait de montrer ses talents de cinéaste, il observe encore beaucoup, auprès de Robert Bresson (il devient assistant sur Un condamné à mort s’est échappé, sur lequel il se liera d’amitiés avec François Leterrier), toujours auprès de Cousteau ou au contact de l’actualité (ainsi part-il en Hongrie au moment des évènements de Budapest, à l’automne 1956).
C’est finalement son ami Alain Cavalier qui lui finit par lui soumettre un roman de Noël Calef, intitulé Ascenseur pour l’échafaud : comme tant d’autres cinéastes débutants, son premier film sera donc policier, mais Louis Malle a décidé qu’il ne ressemblerait à aucun autre. Il sait qu’il a beaucoup à prouver, mais il entend démontrer bien plus encore. C’est de cette intention, pleine d’audace et de tempérament, que naissent les qualités comme les défauts d’Ascenseur pour l’échafaud, rendant ce coup d’essai aussi admirable qu’assurément imparfait.