Dans le même quotidien, le 1er octobre
1946, une notule précise sous le titre «Le Revenant [sic] sera là ce soir...» : «On nous informe que le gala du film Un Revenant au cinéma Royal aura bien lieu ce soir, mardi 1er octobre à 20h30, sous le patronage et au bénéfice de l'Association des Anciens Grands Malades. Les places louées précédemment ne sont pas valables et sont remboursables au guichet où elles ont été délivrées. La nouvelle location se fera directement aux guichets du cinéma Royal, au prix unique de 100 F, à partir de mardi, 10 heures».
On remarque beaucoup de discrétion par rapport à la première annonce du gala, et surtout le changement de nom de l'association. Il s'est très probablement passé ce que Raymond Chirat suggérait, mais pour ne pas perdre sa clientèle et son avant-première, l'exploitant a trouvé une association caritative de remplacement en dernière minute, avec un nom proche de la précédente. On explique que les places achetées sont «remboursables au guichet où elles ont été délivrées», sans préciser le nom du «guichet» Dans les articles parus le lendemain, il n'est jamais fait allusion à des éclats dans la salle, ni même au changement d'association, mais on sent la gêne des journalistes.
Le plus beau «retournement de veste» se lit dans Le Tout Lyon. L'hebdomadaire du 13 octobre, dans sa chronique cinéma signée par «le strapontin du 37 bis», marche sur des oeufs : «Peut être n'eussions-nous pas éprouvé une légère déception si l'on nous avait moins emphatiquement annoncé un chef d'oeuvre.(...) La réalisation est honnête, encore que l'on n'ait pas su utiliser toute la photogénie du paysage lyonnais.(...) Il est délicat, étant à Lyon, de juger avec toute l'objectivité désirable, la critique des milieux touchant à la bourgeoisie et au monde des "soyeux". Je pense pouvoir en dire que cette satire eut gagnée à être moins appuyée».