Tandis que Luchino Visconti propose une vision marxiste du roman Les Malavoglia(1881) de Giovanni Verga dans le merveilleux La Terre tremble (La Terra trema) en1948, Giuseppe De Santis poursuit avec le célébrissime Riz amer (Riso amaro) en 1949 sa vision très personnelle d'un cinéma populo-réaliste, poussant à leur extrêmecertaines idées gramsciennes(??) mélangeant valeurs sociales et goût du mélodrame, idées progressistes et sensualité explosive.
Cependant, l'Histoire suit son cours : les élections de 1948 marquent une nette défaite de la gauche, comdamnée à l'opposition après la parenthèse de l'après-Résistance. Le climat culturel, également, se met à changer : il prépare ainsi le lent mais inexorable déclin de l'expérience néorealiste qui produira encore une dernière floraison avant de faner. Un gouvernement modéré de tendance américanophile a été instauré, la rupture de la solidarité de l'après-guerre devient définitive : pendant que le capitalisme étend son emprise, un vent de conservatisme souffle sur le pays.
La politique culturelle affiche un optimisme de façade, l'étalage des douleurs et des misères du peuple vaincu commence à déranger le pouvoir. Vittorio de Sica, déjà au centre de polémiques pour ses précédentes oeuvres,le découvre à ses frais pour le magnifique Umberto D en 1952,lucide et rigoureuse
description de la misérable solitude d'un retraité:on va lui reprocher de présenter la vie quotidienne avec une vision trop sacrilège, et les voix qui s'élèvent contre lui sont celles de jeunes politiciens de la Démocratie chrétienne appelés à faire carrière.
Exhortations superflues car déjà les cinéastes abandonnent la structure néoréaliste comme une tunique de Nessos et se tournent vers d'autres expériences : c'est le cas de Vittorio de Sica, par exemple, qui préfère écouter les sirènes d'une carrière internationale avec réussite commerciale à la clé, en délaissant l'aspect de la prouesse artistique, qui, sans disparaître totalement, sera moindre que celle d'antan.
Plus complexe est le parcours suivi par Luchino Visconti : en 1951, Bellissima se présente comme l'épitome du néoréalisme ainsi que de sa force critique, alors qu'avec Senso en 1954, il se tourne vers un réalisme bourgeois aux tonalités mélodramatiques, signant un travail magistral mais désormais loin des formulations exprimées dans la précédente trilogie (Les Amants diaboliques (Ossessione), La Terre tremble (La Terra trema), Bellissima).