Christiane Passevant : Quel est le déclic qui a initié le film ? Qu’est-ce qui vous a guidé au départ, l’idée d’une famille recomposée ?
Panos H. Koutras : Ce n’est jamais très simple. En fait, c’est à la fois simple et compliqué. En ce qui concerne Strella , je voulais depuis longtemps raconter cette histoire. Cela me tenait à cœur de parler de la communauté transsexuelle et, en même temps, c’est un clin d’œil à ma culture. Comment percevoir aujourd’hui, en 2010, une forme de la tragédie grecque.
Christiane Passevant : La présence de la culture grecque est en effet perceptible dans la forme tragique. Vous l’avez voulu ainsi ?
Panos H. Koutras : Je suis grec et évidemment imprégné de ma culture, néanmoins mon intention n’a pas été de faire un film grec. J’ai voulu parler de quelque chose d’universel afin de toucher le plus de monde possible.
Christiane Passevant : Le film est déjà distribué en France ?
Panos H. Koutras : La sortie en France est le 17 novembre .
Christiane Passevant : Comment avez-vous travaillé la bande son ?
Panos H. Koutras : Pour la musique, j’ai travaillé avec un musicien qui a déjà composé la musique de mon précédent film . C’est un jeune compositeur avec lequel j’aime travailler. J’ai également beaucoup utilisé les ambiances et les bruits, le train par exemple qui est très présent et rythme en quelque sorte l’évolution du film. Cela crée un tempo dans l’appartement le train qui passe...
Larry Portis : Strella est un film sur la famille et non pas sur la sexualité
Panos H. Koutras : Vous avez raison. Le film ne pose à aucun moment de questions sur la sexualité et la transsexualité. Il y a certes des transsexuel-les, c’est un fait, mais c’est un film sur la famille, et particulièrement sur le lien qui lie les personnages. Ce qui m’intéressait, c’est le besoin de l’un pour l’autre et jusqu’où peut-on aller pour satisfaire ce besoin.
Je préfère au mot amour, qui me semble abstrait même si c’est un très joli mot, le mot besoin ou le manque affectif. Ce qui est le moteur de tout drame, de toute fiction, c’est le manque. Le manque de Strella durant son enfance, le manque de son père quand il est en prison, le manque qui les sépare et ensuite les rassemble.
Larry Portis : La véritable question que pose le film est finalement qu’est-ce que la famille ?
Panos H. Koutras : Pour moi, c’est un groupe de personnes qui s’aiment, se respectent et sont prêtes à s’aider mutuellement sans qu’il y ait des obligations.
Larry Portis : Pas dans le sens conventionnel.
Panos H. Koutras : C’est cela. Le film a d’ailleurs un côté kitsch, un peu love story. C’est pour cela que le mot amour est très beau, mais ne veut pas dire grand chose. L’important est ce que l’on fait avec l’amour. De par mon expérience, c’est le manque de l’autre qui définit l’intensité de l’amour que j’ai pour une personne.