Commentaire/Analyse/Critique
par Ludovic Sanches
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Plus encore qu ’ Easy Rider, Zabriskie Point embrasse en un film les bouleversements de la société américaine des années 70 au moment même où ils se déroulent. C’est peu dire si Antonioni est en prise directe avec la réalité de son temps et si son film s’impose d’emblée comme un témoignage sur le pays qu’il filme. Après la Grande-Bretagne de l’époque du swinging London qu’il observait à la loupe du thriller métaphysique dans Blow Up, c’est à l’Amérique qu’il s’attaque, sous la forme du road movie, deux ans après le film de Dennis Hopper,quelques années avant les errances des oeuvres de Wim Wenders.
On ne répétera jamais assez que le road movie genre majeur du cinéma des années 70,n’est autre que le pendant moderne du western, tant il ambitionne de refaire le trajet des pionniers, comme si faire la révolution (marxiste ou autre), c’était aussi reprendre l’histoire des USA aux origines. A ce titre, ce jeune couple formé par deux êtres ne se reconnaissant pas dans les modèles qu’on leur propose et qui vont tout laisser derrière eux pour errer dans le désert, c’est un peu l’espoir de la renaissance d’une autre Amérique.
Cette errance hypnotique dans le désert tranche volontairement avec la violence et la froideur urbaine de la première partie qui brosse, sur un mode proche du reportage (la longue scène de l’assemblée générale étudiante, filmée caméra à l’épaule au début du film) le tableau d’une jeunesse qui refuse une société oppressante et dont les élans de révolte sont brutalement réprimés.