Analyse(suite)
D’autres éléments du film peuvent être considérés comme des symboles. Ce n’est pas par hasard que les événements se déroulent sur la via Aurelia, l’artère qui sort de Rome et se dirige paresseusement vers les côtes de Fregene et du haut Latium. C’est en effet la route qui, plus que toute autre durant les années soixante, a représenté le mythe collectif et générationnel des vacances, de l’évasion et du bien-être.
La via Aurelia est aussi une forme de synthèse sociale. Son tracé, qui part du centre de la ville, traverse d’abord les quartiers bourgeois de la capitale en croissance, près du centre historique, puis traverse brièvement les quartiers populaires, et, passant rapidement par les derniers secteurs agricoles du Latium, rejoint les plages populaires de la côte ou les petits centres aisés de la région de Fregene, Santa Marinella et se termine à Capalbio, après une multitude de constructions illégales.
Les personnes que les deux protagonistes rencontrent durant leur voyage sont en fait un aperçu très précis de la société romaine de l’époque. Même l’automobile, une Lancia Aurelia B24 est aussi un symbole (la similitude du nom avec la Via Aurelia n’est pas un hasard). L’automobile, disponible en 1956, a d’abord été le prototype de la voiture élégante et raffinée, mais elle est bien vite devenue représentative de la voiture agressive, imposante, au moteur modifié.
Dans de nombreuses scènes du film, on peut apercevoir sa carrosserie. Le flanc droit garde les traces du travail d’un carrossier, les réparations sont encore visibles, ce qui montre les mésaventures de la voiture et de son propriétaire.Dino Risi a choisi ce modèle de voiture puisqu’il représente justement le changement de sens d’une idée, celle de l’Italie du miracle économique qui allait bientôt se finir, laissant la place à une société divisée et contradictoire dans laquelle seuls les bons à rien opportunistes et leurs valeurs morales bénéficieraient du bien-être social.