Analyse du film par Olivier Bitoune /DVDClassik © DR - (suite)
Fellini ira encore plus loin dans cette unification et cette dilution de l'extra-diégétique (Hou la !! ça...ça doit faire drôlement mal!) et l'intra-diégétique (arf arf arf!!) avec son épilogue qui voit le cinéaste nous montrer l'envers du décor (la caméra, la grue, les effets mécaniques du plateau, l'ingénieur du son) grâce à de lents travellings et panoramiques qui achèvent d'inscrire Et vogue le navire dans son mode de représentation déconnecté de toute forme de réalisme dans le seul but de nous montrer un univers désuet dont il ne reste que des souvenirs plus ou moins enjolivés.
Cette approche originale traduit la puissance du cinéma selon Fellini qui aspire, sans être dupe, à mettre en forme les rêveries les plus étranges (comme la présence du rhinocéros) et à donner à ces souvenirs une coloration mystérieuse et un peu vague (d'où l'utilisation d'une palette chromatique très douce par Giuseppe Rotunno). Fellini convoque ainsi toute la machinerie impressionnante de Cinecittà (qu'il nous expose donc à la fin) pour nous livrer, dans une mise en abyme , un double testament: celui d'un monde révolu et celui de l'art chargé de le reconstituer dans un ultime rêve évanescent.