OPENING NIGHT
(Gena Rowlands y est formidable mais le film
m'a fortement ennuyé et vaguement déprimé)
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En mai 1987, il monte au théâtre une pièce de sa composition : A Woman of Mystery. À l'origine, John Cassavetes envisageait d'en faire un film, mais sous la pression de ses proches qui ne veulent pas le voir se fatiguer, il se replie pour la scène.L'histoire se déroule sur trois actes : une sans-abri (Gena Rowlands) croise et recroise des personnages en mal d'affection ainsi que des figures de son passé. Ses rencontres remettent en cause son isolement mais, rompue à la solitude, elle ne parvient plus à se sociabiliser.
La pièce est donnée quinze jours au Court Theatre de West Hollywood, une petite salle contenant une soixantaine de places. Il se met ensuite à écrire plusieurs scénarios dont Beguin the Beguine pour Ben Gazzara, une suite de Gloria et révise le script de She's So Lovely pour Sean Penn qui est en définitive réalisé par son fils, Nick Cassavetes, dix ans plus tard. En février 1989, il décède à 59 ans des suites de sa cirrhose.
Processus créatif
L'homogénéité du processus créatif dans la carrière de John Cassavetes est un de ses traits notables, à telle enseigne qu'on a pu parler de « méthode». À quelques exceptions près, en effet, il procède de la même manière pour chacune de ses productions.
L'acteur roi
L'axe principal du processus créatif du cinéaste est l'interprétation. L'acteur est au centre du travail deréalisateur de John Cassavetes. Il s'applique à créer autour de lui une atmosphère propice à épanouir son jeu dont le but est de l’amener à se mettre au diapason de son personnage,à évoluer spontanément dans sa peau. Sur le plateau de tournage, le cinéaste peut ainsi consacrer de longues heures aux répétitions avant de mettre en route l’équipe technique.
L’acteur doit être à l’apogée du climax qu’il s’est employé à exhorter. De nombreux acteurs font leurs premiers pas dans ses films :Seymour Cassel,Lynn Carlin, Laura Johnson.L'approche d'un amateur pourra garantir un renouvellement et une remise en cause des approches professionnelles Autre particularité, le cinéaste veille dès Shadows à la liberté de mouvement des comédiens.Il libère le jeu des astreintes du cadre. Il lui laisse aussi la marge nécessaire pour au besoin modifier les dialogues,faire évoluer le personnage qu’il incarne jusqu'à emmener le film dans des directions qui n'étaient pas préétablies.
Pour autant, il ne laisse pas à l'acteur une liberté totale. Si Shadows est en grande partie improvisé (il est d'ailleurs née d'une improvisation), les films suivants y font peu appel .La technique est aussi au service de l'acteur. John Cassavetes dira volontiers qu'elle lui importe peu et que c'est à elle de se soumettre aux comédiens et non l'inverse.(mwouais...des conneries tout ça selon moi) Il se reproche d'ailleurs d'« être tombé amoureux de la caméra » lors de la production de Shadows,qui est le seul de sa filmographie où apparaissent des tentatives de compositions photographiques.
John Cassavetes désire s'affranchir d'un langage cinématographique dont le cadre est l'élément prédominant et directeur : « Je déteste l'idée qu'un film est fait par le cadre ou la caméra. Je n'ai jamais vu une bonne scène qui ne soit bonne quel que soit l'angle de la caméra ».(ça me rappelle cette phrase de Richard Avedon (photographe célèbre) qui aurai déclaré : Le matériel m'ennuie,J'aimerai pouvoir capter l'image avec mon seul regard...Tssss cabotinages...cabotinages!)
Spontanéité
John Cassavetes est en recherche constante de spontanéité :"Tout dans un film doit trouver son inspiration dans l'instant ". Le cinéaste encourage les techniciens à prendre des initiatives et faire preuve d'autonomie, de la même manière que pour les comédiens.
Le plan de travail n'est pas préétabli. Il se fait, dans la spontanéité, au jour le jour, au gré des scènes à tourner. La liberté de mouvement des acteurs implique de prendre certaines dispositions techniques. Les séquences sont tournées avec plusieurs caméras qui sont équipées de longues focales, de façon à pouvoir suivre au mieux les comédiens, sans avoir à se préoccuper constamment des mises au point. La caméra est la plupart du temps portée pour mieux les accompagner. (du coup c'est assez chaotique)
Le réalisateur exige des techniciens une disponibilité maximum. Ils peuvent être sollicités à tout moment pour mettre en route la caméra alors même que les acteurs sont en train de répéter une séquence et ignorent qu'ils sont filmés. La prise de vue peut ainsi démarrer dans une scène en cours et ne s'arrêter que lorsque la pellicule arrive à son terme. C'est aussi cette fluidité propre à sa manière de travailler qui a empêché John Cassavetes de s'accommoder des impératifs financiers et administratifs des studios, et provoquer la rupture avec l'industrie cinématographique américaine.
Intimité
C’est dans l’intimité que John Cassavetes crée ses films ou met en scène ses pièces de théâtres. Il s’entoure la plupart du temps de ses proches, techniciens (Al Ruban, Sam Shaw ...) ou acteurs (Gena Rowlands, sa femme, Nick Cassavetes, son fils, Seymour Cassel, Ben Gazzara, Peter Falk ...). Il ira jusqu’à diriger sa propre mère, dans trois films, et celle de Gena Rowlands dans Minnie et Moskowitz. Il pioche dans ce cercle rapproché des ressources artistiques, du début à la fin de sa carrière.
Les tournages eux-mêmes se déroulent au sein du foyer familial. Faces et Une femme sous influence sont tournés dans la maison du couple Cassavetes-Rowlands.Les sujets de ses films n’excèdent pas davantage le cadre de l’intimité. Lorsque John Cassavetes lance son appel de fonds à la radio pour financer Shadows, il déclare : "Si les gens veulent vraiment voir des films sur des gens, ils devraient contribuer ».
La dramaturgie est au diapason de ce que vivent les « gens ». Ses personnages n'évoluent pas dans la marginalité, bien au contraire. John Cassavetes filme la classe moyenne américaine et s'intéresse à ses préoccupations au quotidien. Son regard sur cette classe sociale n'est d'ailleurs pas idéologique, ni sociologique. Ses films n'ont pas davantage valeur de stigmatisation. Ils témoignent simplement des sentiments, des faiblesses des protagonistes.
L'intrigue est guidée par les circonstances ordinaires, intimes aux personnages. Mariage, infidélité, divorce, amitié, deuil ... autant d'évènements ordinaires, à l'échelle de ses personnages. La famille est ainsi un propos récurrent du réalisateur. Tantôt il s’agira du couple (Faces, Minnie et Moskowitz ...), tantôt il s’agira du foyer (Une femme sous influence).
Quand les personnages n’évoluent pas dans leur milieu familial, ils le recréent et s’inscrivent dans une communauté, dans un clan où les liens sont – sinon similaires – au moins aussi étroits entre les protagonistes. Dans Shadows, notamment, les personnages de Lelia, Ben, Hugh et Tony se disent une famille. De même, dans Meurtre d'un bookmaker chinois, Cosmo Vitelli noue des liens qui ont un caractère quasi- familial avec ses employés.